Sexualité chez les jeunes : en 2023, 32 % des 15-17 ans déclarent avoir eu leur premier rapport avant 16 ans, selon Santé publique France. À la même date, le nombre de dépistages d’IST chez les moins de 25 ans a bondi de 18 % en un an. L’urgence est palpable. Les comportements évoluent vite, mais les outils éducatifs peinent à suivre. Décryptage, chiffres clés et pistes d’action.
Mutations sociétales et comportements sexuels des 15-24 ans
La génération Z a grandi avec Tinder, Netflix et #MeToo. Résultat : les représentations du corps et du consentement n’ont jamais été aussi débattues. L’Institut national d’études démographiques (INED) révèle qu’en 2022 l’âge médian du premier rapport est remonté à 17,6 ans, contre 17,2 ans en 2010. Plus tardifs mais plus connectés, les jeunes cumulent discussions en ligne et expériences différées.
H3 Tendances chiffrées récentes
- 58 % des 18-24 ans pratiquent le sexting au moins une fois par mois (Observatoire du Numérique, 2023).
- 41 % des lycéens affirment avoir vu des contenus pornographiques avant 14 ans (CSA, 2022).
- Les ventes de préservatifs ont reculé de 12 % entre 2019 et 2023, alors que les diagnostics de chlamydia ont progressé de 24 % (Santé publique France).
D’un côté, une envie de transparence et de sécurité émotionnelle. De l’autre, une exposition précoce à la pornographie pouvant biaiser les attentes. Ce contraste alimente les consultations en planning familial, où la demande d’« informations fiables » a doublé depuis 2021.
Comment parler de sexualité chez les jeunes en 2024 ?
La question revient dans les salles de classe, les cabinets médicaux et… les fils Instagram. Pourquoi la communication reste-t-elle difficile ? Plusieurs freins s’imbriquent :
H3 Tabous persistants
- 47 % des parents se disent « mal à l’aise » pour aborder la contraception (Baromètre Ipsos, 2023).
- 1 cours d’éducation à la sexualité sur 3 n’est pas assuré au collège, malgré l’obligation de trois séances annuelles (Ministère de l’Éducation nationale).
H3 Saturation informationnelle
Les jeunes jonglent entre comptes militants, influenceurs bien-être et sites pornographiques. Cette profusion crée un « bruit cognitif » compliquant la vérification des sources.
H3 Rôle du numérique
Le smartphone est la première source de réponses sur la sexualité ; 72 % des 15-19 ans consultent TikTok ou YouTube avant un professionnel de santé (CSA, 2023). D’un côté, la démocratisation du savoir. De l’autre, des contenus parfois non modérés ou mensongers.
Risques sanitaires et défis éducatifs
Les autorités rappellent que la sexualité des jeunes se joue aussi sur le terrain de la santé publique.
H3 IST et contraception
- En 2024, 3 000 nouveaux cas de syphilis ont été enregistrés chez les 18-25 ans, le plus haut niveau depuis 1990 (OMS Europe).
- Seule 1 jeune femme sur 4 renouvelle correctement sa pilule, faute de suivi (HAS, 2023).
L’accès gratuit au préservatif masculin jusqu’à 26 ans, annoncé par Emmanuel Macron en janvier 2023, marque un tournant. Toutefois, les ruptures de stock en pharmacie (février 2024) montrent les limites logistiques de la mesure.
H3 Santé mentale et consentement
Un rapport de l’ONU-Femmes (2023) souligne que 35 % des étudiantes ont subi au moins une pression pour un acte sexuel non désiré. La santé mentale est donc indissociable des politiques de prévention.
Vers une sexualité responsable : pistes et recommandations
Face à ces constats, quelles solutions concrètes ?
H3 Renforcer l’éducation affective et sexuelle
- Impliquer des professionnels formés (infirmiers scolaires, associations comme le Planning familial).
- Utiliser des formats mixtes : ateliers en présentiel, vidéos vérifiées, podcasts interactifs.
H3 Encadrer le numérique sans diaboliser
- Déployer un label « Info Sexe Fiable » sur les réseaux, calqué sur les pastilles « nutrition » de Spotify.
- Former les enseignants à repérer et déconstruire les mythes véhiculés en ligne.
H3 Miser sur la diversité des supports
La série « Sex Education » de Netflix a prouvé qu’un discours pop-culture pouvait toucher 40 millions de foyers. Adopter une approche croisée : art, musique, témoignages, sciences (littérature grise, revues médicales) favorise la mémorisation.
H3 Impliquer les garçons
Les campagnes se focalisent souvent sur les jeunes femmes. Or, la responsabilisation masculine réduit de 25 % la propagation des IST (Lancet Public Health, 2022). Des ateliers non mixtes, inspirés des programmes scandinaves, montrent des effets concrets sur la durée.
Check-list pratique à destination des institutions
- Former 100 % des enseignants du second degré d’ici 2026.
- Mettre à disposition un kit numérique (vidéos, quizz, BD) accessible hors ligne.
- Consolider les liens entre centres de santé universitaires et associations locales.
- Lancer, chaque rentrée, une campagne nationale autour d’un mot-clé fédérateur : #Consentement2025.
Ce qu’il faut retenir
Les données sont claires : sexualité chez les jeunes rime aujourd’hui avec pluralité des sources, incertitudes sanitaires et exigences d’accompagnement. Entre sexting, pornographie massive et éclosion de nouveaux modèles relationnels (polyamour, asexualité), les repères changent vite. Les institutions doivent donc passer d’une logique purement préventive à une approche globale : santé, psychologie, culture numérique.
Je poursuis depuis dix ans l’évolution de ces enjeux et je reste impressionnée par la capacité d’adaptation des 15-24 ans. Pourtant, sans un cadre solide, l’auto-éducation atteint ses limites. J’invite donc chacun à rester curieux, à dialoguer, et à explorer nos dossiers connexes sur la contraception masculine, la santé mentale étudiante et la prévention du harcèlement en ligne. Parce qu’une sexualité éclairée commence toujours par une information fiable.

